Laurent Houssard et Benoît Legrand apprennent le chinois à l’Institut Confucius. De mi-juillet à mi-août 2012, ils ont vécu sur le campus de l’Université de Ludong dans la ville de Yantai (ville jumelle d’Angers) pour un séjour linguistique. Pour chacun, c’était également le tout premier voyage en Chine. Laurent Houssard a bénéficié d’une bourse du Hanban pour son séjour. Retour sur leurs expériences respectives et quelques anecdotes!
Laurent et Benoît (à droite) à l’Université de Ludong, Yantai
Pourquoi avez-vous décidé de partir à l’Université de Ludong à Yantai en Chine ?
Benoît : Le but, c’était d’améliorer mon chinois, d’avoir une connaissance de la Chine, de la culture chinoise. Pour ma part, j’aime beaucoup voyager, j’étais déjà allé en Nouvelle-Zélande pour améliorer mon anglais. De plus, je suis étudiant et j’ai du temps l’été. Ce sont les deux raisons qui m’ont poussé à partir. En plus, tout s’était bien passé en Nouvelle-Zélande, donc pourquoi pas en Chine? Ensuite, en ce qui concerne le Shandong, c’est l’Institut Confucius qui m’a permis d’aller à Yantai, parce qu’il y a un partenariat entre la région des Pays de la Loire et la province du Shandong.
Laurent : Apprenant le chinois, cela me paraissait logique qu’à un moment ou à un autre, j’aille en Chine. De plus, dans mon cas, il y avait une question de limite d’âge, car jusqu’à 35 ans j’étais éligible à bourse du Hanban, donc il fallait que je me décide assez vite. Peut-être que si j’avais vraiment eu le choix, j’aurais attendu une année supplémentaire, afin d’avoir un meilleur niveau, mais dans ces circonstances il fallait se dépêcher. C’est tombé sur nous, et j’en suis tout à fait content.
Combien de temps êtes-vous resté en Chine ?
Benoît : Je suis resté un petit peu plus longtemps. Je suis arrivé avant à Pékin. Je suis resté 6 jours dans une auberge de jeunesse et j’ai visité les principaux monuments de Pékin. Je suis arrivé un peu plus tôt à Yantai ; on m’avait dit qu’on pouvait le faire, on m’avait dit qu’il y aurait des étudiants qui seraient là pour s’occuper de nous. Voilà. Du coup, je suis arrivé avant tous les autres étudiants qui faisaient partie du programme d’échange d’été, à part un. Donc, en tout je suis resté 39 jours en Chine.
Laurent : Moi je suis resté 33 jours. Je suis arrivé directement à Yantai et je suis rentré en France un petit peu plus tard que Benoît.
Comment s’est passé l’accueil à votre arrivée ?
Benoît : Ce fut un très bon accueil. En ce qui concerne le logement, on ne nous a pas trop donné d’informations, on ne nous a pas indiqué où sont les produits d’entretien, comment utiliser les machines à laver… Donc pour ma part, ce sont des étudiants coréens qui se sont vraiment occupés de moi. Eux ne faisaient pas partie du programme d’échange mais ils étaient l’année et m’ont tout expliqué.
Laurent : Pour moi, l’arrivée fut un peu plus facile, parce que quand je suis arrivé, Benoît été déjà là, donc il m’a un peu « coaché » sur les différentes fonctionnalités du bâtiment. On a été se promener en ville, et puis assez vite, on a été assez autonome finalement. Yantai n’est pas une ville immense donc dès lors qu’on a compris où étaient les bus, où l’on pouvait faire ses courses, c’est devenu une vie d’étudiant assez normale, sauf que c’est en chinois, mais à part ça tout le reste est pratique.
Laurent et son colocataire coréen
Comment se sont déroulés les cours ?
Benoît : Ça, c’était le plus amusant je pense, on a des choses à raconter !
Laurent : On a été accueilli par un test.
Benoît : Un HSK 4. C’était simple, on nous donnait un document, ceux qui ne pouvaient pas le lire étaient dans le cours débutant, ceux qui essayaient se retrouvaient dans le groupe 2. En fait, on a trouvé qu’il y avait un problème sur leur définition des niveaux de chinois. Leur façon de juger les niveaux de chinois n’était pas très claire.
Laurent : Par exemple, en ce qui me concerne, du fait que j’avais passé le HSK 3, ils ont estimé que j’étais vraiment dans les bons mais sans vraiment lire mon test. Je le sais, je l’ai gardé, je ne leur ai pas rendu, parce que j’avais trop honte! Mais je pense aussi que c’était dû à mon âge, parce que j’étais le plus vieux, donc ils se sont dit que je devais avoir étudié plus longtemps.
Benoît : Il y avait des Coréens qui avait un niveau bien meilleur que le nôtre, qui méritaient d’être dans un niveau au-dessus, mais qui ne l’étaient pas.
Laurent : Mais ensuite, on a heureusement pu rectifier le tir et se retrouver dans les groupes qui nous correspondaient.
Benoît : Même au sein d’un même groupe, et c’est ça le plus particulier, les cours étaient de niveaux très différents. Il y avait certains cour, le matin, où l’on apprenait 2 mots de vocabulaire, et d’autres, un prof en particulier, où l’on devait retenir 30 nouveaux mots, les exigences étaient aussi de plus haut niveau.
Combien d’heures de cours par semaine aviez-vous ?
Laurent : On devait avoir 20 heures de langue par semaine, 4 heures par jour, donc 2 fois 2 heures, c’est-à-dire un premier cours de 2 heures, suivi d’un second cours de 2 heures. Chaque matin du lundi au vendredi, de 8h à midi avec 3 professeurs de langue et 1 professeur de civilisation.
Benoît : L’après-midi, on avait des activités de calligraphie et de tai-chi-chuan. C’était toujours la même chose, une fois sur deux, soit du tai-chi soit de la calligraphie. Mais dans les faits, on n’y a pas trop participé. Le matin était déjà suffisant, on avait beaucoup de travail personnel sur les cours en début d’après-midi ou en fin d’après-midi, donc on préférait éviter les activités annexes. Mais on n’était pas les seuls. Sauf le vendredi après-midi où c’était très intéressant car on rencontrait des étudiants chinois qui apprennent le français. Nous en avons rencontré deux, et tous les vendredis on se voyait.
Avez-vous le sentiment d’avoir progressé ?
Benoît : Ah oui ! D’ailleurs, j’ai même trouvé que les cours les plus durs étaient les plus efficaces. Celui-là (le prof cité ci-dessus) ne nous laissait aucun temps de pause. Ça marchait toujours de la même façon, il nous faisait lire entre 20 et 30 nouveaux mots de vocabulaire.
Benoît à la découverte de Yantai avec un ami coréen
Vous êtes-vous fait des amis ?
Laurent : Complètement, oui. On a forcément rencontré des personnes d’autres nationalités, car on n’était que deux Français. Nous étions en cours avec d’autres étudiants, des Coréens et des Canadiens en ce qui nous concerne.
Benoît : Il n’y avait que quatre nationalités présentes dans les cours d’été : Canadiens, dont une grande partie venait de la communauté asiatique canadienne avec un très bon niveau de chinois, Coréens, Anglais et les deux Français.
Laurent : Ça se mélangeait pas mal, mais bizarrement on était plus copain avec les Coréens qui étaient peut-être plus ouverts, moins soudés en blocs nationaux. Peut-être plus curieux de nous aussi, et comme on était moins nombreux et plus disponibles, on n’a pas fait tellement d’excursions en groupe autrement qu’entre amis.
Comment se passait la vie en dehors des heures de classe (visites, sorties…) ?
Laurent : Le soir, je mangeais assez tôt, vers 18h30, et je me couchais de bonne heure. Parfois, on faisait des sorties en ville, mais généralement, je me couchais vers 9 heures le soir, donc c’était l’heure où le campus se réveillait plus ou moins. Donc, j’ai vécu un peu en décalé par rapport à mon colocataire, il y avait plusieurs fuseaux horaires sur le campus, mais ça ne m’a pas empêché de faire un certain nombre de balades. On est allé visiter Yantai, j’ai visité 2 ou 3 parcs, la plage, on est allé à une cinquantaine de kilomètres visiter une ancienne ville portuaire fortifiée. On est aussi allé aussi au zoo de Yantai, on a vu des pandas, on s’est fait attaquer par des moustiques. C’était chouette! C’est vrai qu’au bout de quatre semaines à Yantai, j’imagine qu’on a un peu fait le tour, mais pour le temps que j’y ai passé, je ne me suis vraiment pas ennuyé.
Benoît : C’était plutôt des sorties le soir. J’étais souvent avec des Coréens qui ne parlaient pas beaucoup anglais, donc c’était pas mal. En chinois, ils avaient beaucoup de vocabulaire mais pas une bonne grammaire, donc on parlait une sorte d’anglais-chinois. En tout cas, c’est sûr que ça a bien fait progresser mon chinois!
Avez-vous rencontré des difficultés particulières lors de votre séjour ?
Laurent : Non pas vraiment, on avait une grande liberté, on était peu encadré donc on pouvait faire ce que l’on voulait. Ce qui m’a un peu manqué, c’est qu’au bout d’un moment j’aurais aimé avoir 2-3 livres en français en plus, 1 ou 2 films, etc. Je ne m’attendais pas à être coupé comme cela de la culture française. Mais ce n’était pas si dérangeant que cela.
Benoît : Le petit déjeuner a été la chose la plus difficile, mais à part ça c’était très bien. Je prenais des snacks, car je ne pouvais pas manger de la nourriture chinoise dès le matin. Pour le déjeuner et le dîner, ça nous arrivait de manger chinois, mais on se dirigeait plutôt vers la nourriture coréenne.
Laurent : C’est moins déstabilisant. Je trouve que la cuisine chinoise est très salée et très grasse. Il n’y a pas vraiment un plat appétissant, c’est plutôt un mélange de plusieurs plats qui va être appétissant, donc il faut connaître un minimum pour faire les bons choix. Mais j’ai quand même bien mangé.
Benoît à la découverte de Yantai
Quels sont les points positifs qui ressortent de cette expérience ?
Benoît : Il y en a beaucoup. Un séjour très agréable qui m’a permis d’avoir un aperçu de la culture chinoise. Pour ma part, c’était plutôt un « mix » entre culture chinoise et culture coréenne. Puis, j’ai l’impression d’avoir progressé en chinois.
Laurent : En ce qui me concerne, cela m’a donné envie de continuer, car j’ai beaucoup pratiqué l’oral et j’aimerais faire le lien avec l’écrit pour capitaliser ces nouveaux mots, ces nouvelles tournures. C’est très encourageant. Sinon, l’accueil était excellent. C’était la première fois que je partais en Chine, et je pense que le séjour linguistique est un bon moyen d’aller au-delà des apparences, de sentir certaines réalités du pays par-delà les séjours purement touristiques. Par exemple, le fait de prendre le bus en Chine avec de « vrais » Chinois, être confronté à de vrais problèmes quotidiens, etc. D’autant plus que tout s’est bien passé. J’ai réussi à aller partout où je voulais, dans les conditions que je voulais, et j’ai trouvé les Chinois très disponibles, toujours prêts à aider. J’encourage vraiment les Français à se rendre là-bas, et c’est vrai que dès lors que l’on parle un petit peu chinois, cela facilite les choses et l’on se sent encore mieux accueilli. Par ailleurs, compte tenu du fait que les Chinois prennent l’éducation très au sérieux, les conditions d’études étaient idéales.
Avez-vous une anecdote à raconter, un moment qui vous aurait surpris ou amusé ?
Benoît : C’est vrai que c’est toujours drôle, je ne sais pas, de demander quelque chose. Par exemple : « Où est-ce que je peux brancher mon ordi ? » et qu’on te ramène des ciseaux !
Laurent : Je n’ai pas le souvenir d’avoir eu affaire à ce genre de situation. Je me souviens que j’ai failli faire boire de la lessive à Benoît qui pensait que c’était une boisson exotique ! Et sinon, je me souviens que de la fenêtre de la chambre de Benoît on pouvait y observer 12 terrains de basket et 9 terrains de volley, voilà la Chine ! Tout est super géant!
Laurent : Il y a eu de nombreuses anecdotes marrantes, mais pour se faire des blagues on était limité par la langue, donc c’était surtout basé sur des imitations, des parodies et aussi beaucoup d’humour de répétition. En cours par exemple, c’est une pédagogie basée sur la répétition, donc cela nous encourageait à notre tour à parodier les professeurs. Il y avait un prof que l’on aimait bien, assez ambitieux, qui nous donnait la veille pour le lendemain un texte de 10 – 15 phrases idiomatiques, des constructions pas du tout familières, à apprendre par cœur. Il avait du mal à comprendre que l’on puisse avoir des difficultés le lendemain!
Benoît : Il nous donnait le texte, il le lisait, il fallait qu’on le traduise en français. Et le lendemain, en s’appuyant sur notre texte traduit, il fallait lui redonner une version en chinois. Déjà qu’il y avait des trous dans mon texte en français, alors le refaire en chinois, ce n’était pas évident.
Laurent : Il y a eu des chansons aussi. On a passé des heures et des heures à chanter mais sur le principe de la répétition. Le play-back arrivait à la fin, et on repartait au début. Au bout d’une heure et demie à chanter la même chanson 3 minutes 30, tu ne peux plus la supporter la chanson!
Benoît : Pour nous c’était impossible de comprendre comment ils pouvaient faire ça, même lui (le professeur) devait être fatigué de cette chanson, tout en pensant que c’était efficace.
Ce séjour vous a-t-il donné envie de réitérer l’expérience ?
Benoît : Si j’ai le temps, j’aimerais bien. Mais ce ne serait pas à Yantai, je changerais de ville. La Chine est immense, si on ne connaît qu’une petite partie c’est dommage.
Laurent : Cela m’a donné envie de repartir mais pas uniquement pour des études, pour un échange quelconque, un travail éventuellement.